Emergence et développement de la notion d'accompagnement social


On note l’émergence de la notion d’accompagnement au cours des années 1970, d’une part dans le contexte traditionnel des institutions recevant du public handicapé, d’autre part, dans les établissements spécialisés traitant les pathologies psychiatriques.


L’environnement n’est alors guère préparé à admettre la participation directe des malades psychiques et des personnes handicapées à la vie collective. Mais on assiste à une évolution des pratiques liées à plusieurs éléments dont le développement des thérapeutiques neuroleptiques et une forte volonté d’intégration du secteur médico-social. Et à la demande pressante des associations familiales, va apparaître cette conception de "professionnels de l’accompagnement" appelés, dans un premier temps, " équipes de suite". Celles-ci sont mises en place dans les établissements accueillants des adolescents et des adultes handicapés.


Cette notion d'accompagnement est formalisée pour la première fois dans une circulaire de Marie-Madeleine Dienech  en 1973.


En 1974-75, période encore marquée par un bon niveau d’emploi et une croissance satisfaisante, les mots d’ordre participatif sont présents dans le secteur social, comme en témoignent les objectifs  de la loi d’orientation des personnes handicapées de 1975 (loi n° 75-734) :



  • passer de l’assistance à la solidarité ;




  • permettre, ou du moins favoriser l’autonomie des personnes handicapées, leur accès aux institutions ouvertes à l’ensemble de la population et leur maintien dans un cadre dit ordinaire de travail et de vie.



Et l'article 1er de la loi stipule : "Leur intégration constitue une obligation nationale".


La loi de 1975  relative aux institutions sociales et médico-sociales (loi n° 75-735) organise la mise en place de lieux d'accueil et d’intervention adaptés aux prérogatives de la loi d’orientation. Elle institue également, dans le domaine du travail, les "équipes de préparation, de suite et de reclassement" (EPSR).  Mais la relation préférentielle prévue entre les EPSR et l’Agence pour l’Emploi ne permet pas de donner toute l’ampleur prévue aux équipes de suite.


L’application des dispositions de ces deux lois entraîne un développement massif des institutions : foyers, lieux de travail protégés...  


Parallèlement, la crise économique naissante va considérablement réduire les chances d’insertion des personnes handicapées. Cet échec sera encore illustré, au nom du réalisme économique, par la non-application de la loi du 10 juillet 1987 en faveur de l'emploi de travailleurs handicapées, les employeurs préférant majoritairement verser une participation financière plutôt qu'embaucher les personnes handicapées.   


Dans ce contexte, un double mouvement se précise :


  • dans les institutions, le développement de pratiques éducatives vise l’acquisition d’une vie sociale pour les personnes handicapées (Services socio-éducatifs, Services  d’Accompagnement   rattachés/ou non aux Centres d'Aide par le Travail, aux foyers d'hébergement...) ;

  • dans le secteur psychiatrique, le mouvement de "désinstitutionalisation" entraîne la mise en place de services ouverts, implantés au sein des quartiers, visant la réinsertion sociale des malades plus ou moins stabilisés.

Dans le même temps, lié à la crise économique des années 80, on observe un développement de situations de précarité entraînant, pour les personnes accompagnées, déstabilisation sociale et psychologique, ainsi que l’accroissement d’un travail social individualisé. Les Commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) confirment cette tendance en adressant à ces équipes de suite et d’accompagnement ces personnes en difficulté d'insertion, reconnues "handicapées".


Mais les lacunes de la réglementation ne donnent aucune précision sur la constitution, le rôle et les moyens des Services dits " d’accompagnement ". Et l’on constate que la décentralisation des années 1980, malgré ses aspects positifs, a augmenté cette incertitude en confiant les divers aspects de l’insertion sociale à des niveaux multiples, de l’Etat aux collectivités territoriales locales : Conseil Régional, Conseil Général, municipalité, etc. Ce morcellement engendre un ensemble disparate de services rattachés à des établissements, ou bien autonomes, financés de façons différentes : par budget propre ou sous forme de subventions, ou bien encore de prix de journée, dans le cadre de conventions très diverses.


Dès sa création, en 1987, le MAIS souligne l'importance de ces problèmes et se pose la question de créer et développer une démarche innovante pour les adultes en difficulté d'insertion sociale.


Ces écueils sont également reconnus par les pouvoirs publics, puisque relevés dans l’argumentaire de la révision de la loi 1975. Une évaluation des besoins et moyens s’impose afin de prévoir un cadre souple, mais cohérent, auquel la loi sociale de 1975 ne répond pas.


Il paraît important de répondre à la nécessité de concrétiser dans les pratiques ce passage, annoncé depuis longtemps, de l’assistance à la solidarité dans un objectif d’autonomie, et de porter un autre regard sur la personne souffrante susceptible d’être accompagnée.


Dès lors, l’accompagnement social s’élabore en fonction de la problématique des personnes handicapées, problématique d’insertion sociale, et en fonction des situations aux variations multiples, compte-tenu de la diversité des populations concernées.


S'il s’agit bien et d’abord d’une forme d’action sociale en milieu ordinaire, l’accompagnement social doit être conçu de telle sorte que puisse être entendue et prise en compte la parole du sujet en situation de handicap afin de favoriser l’autonomisation plutôt que la normalisation.


Dès lors le MAIS entretient des échanges réguliers avec le Ministère des affaires sociales et avec la Direction de l'action sociale afin de participer à l'élaboration d'un texte législatif permettant la reconnaissance et la définition des Services d'Accompagnement, garantissant la qualité de l'accompagnement social et le cadre de son action.


Corrélativement, la notion d'accompagnement apparaît dans le domaine de la lutte contre l'exclusion sociale. Elle se développe dans les secteurs de l'accès à l'emploi (Loi  du 20 décembre 1993 relative à l'emploi et à la formation professionnelle), de l'accès au revenu minimum d'insertion (RMI), du droit au logement sous la forme de mesures individuelles ou collectives (Loi Besson du 31 mai 1990). Et elle se concrétise dans la Loi du 29 juillet 1998 d’orientation relative à la lutte contre les exclusions.


En 1993, le Commissariat général du plan, dans son rapport sur l'évolution du travail social, fait sienne cette notion d’accompagnement comme une fonction… « qui tend de plus en plus à se distinguer d’un suivi traditionnel, l’accompagnement n’étant pas centré uniquement sur le comportement de la personne, mais qui inclut le travail d’articulation avec l’offre, la recherche de réponses, leur adaptation à la situation de chaque usager… ».


Et le rapport tend à préciser les différents rôles  que recouvre le terme "accompagnement" :



  • un rôle de médiation entre la personne accompagnée et l’opérateur d’insertion ;




  • un rôle d’accompagnement de proximité ou de quotidienneté (tutorat en entreprise…) ;




  • un rôle d’accompagnement dans un projet et un itinéraire…



L'apparition de ce processus dans le champ du travail social correspond dès lors à la mise en place de dispositifs d'aide et d'action sociale, très techniques et bureaucratiques, qui visent à limiter l'instrumentalisation de la charité et de la solidarité et  la classification des personnes.


Reconnaissance administrative de l'accompagnement social


La mise en œuvre de la loi de rénovation de l’Action sociale  du 2 janvier 2002 appelle une évolution des pratiques et des programmes qui amène progressivement, dans l’ensemble du champ social et médico-social, à passer de logiques trop exclusives de protection et de prise en charge (sans toutefois les abandonner), à des logiques d’accompagnement et d’insertion.


Cette loi vient compléter, rénover et préciser la définition de l'accompagnement social au travers de ses principes généraux :



  • Mettre l’usager au centre du dispositif.




  • Faire reconnaître le respect de ses droits en le faisant, notamment, participer à l’élaboration de son projet personnalisé.




  • Promouvoir la qualité des services rendus.



Le  décret du 11 Mars 2005 relatif aux conditions d’organisation et de fonctionnement des services d’accompagnement à la vie sociale et aux services d'accompagnement médico-sociaux pour adultes handicapés précise et finalise  les modalités de la loi.


La loi du 11 Février 2005 positionne l’accompagnement au rang de la citoyenneté en stipulant l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées.